Les paysages changent. Ce ne sont plus les immenses plaines de Russie, mais une région aux reliefs nettement marqués qui atteignent jusqu'à 750M. Peut-être doit-elle à cette particularité d'avoir évité l'invasion des troupes de Gengis khan.
Lviv fut fondée au XIIIe siècle par le prince Danylo du duché de Galicie-Volhynie. Il lui a donné un nom dérivé de celui de son fils : Lev, ce qui signifie « lion ». Placée sur une route commerciale entre la Baltique et la Crimée, entre la Russie naissante et l'occident, la ville prospéra. Les chevaliers de l'Ordre Teutonique s'en emparèrent en 1349 et la ville resta polonaise sous le nom de Lwów jusqu'en 1772. A la suite de la partition de la Pologne, elle devint sous le nom de Lemberg la capitale de la province autrichienne de Galicie. (ci-dessous, porte fortifiée devant le monastère des Bernardins)
Le 1er novembre 1918, l'empire des Habsbourg étant rayé de la carte, la population ukrainienne locale proclame Lviv capitale de la République populaire d'Ukraine occidentale. La tentative échoue, et sous le nom de Lwów la ville est rattachée à la Pologne jusqu'en 1939. Elle est alors incorporée à la République socialiste soviétique d'Ukraine (dont l'indépendance fut proclamée en 1991).
On devine que la ville rassembla des populations d'origines très différentes, de langues multiples, et d'obédiences religieuses très diverses : protestants, juifs, chrétiens catholiques, orthodoxes, uniates... Ceci explique la multitude d'édifices religieux dans cette ville qui a eu la chance de traverser la seconde guerre mondiale sans destructions majeures. Mais aussi que l'Ukraine de l'Ouest ne perdit jamais son goût pour l'indépendance, que ses populations depuis toujours résistèrent à tous les envahisseurs, l’identité du socle paysan se cristallisant autour de religion orthodoxe.
Les disciples de Cyrille et Méthode, par leur oeuvre d’évangélisation dans le courant du 9ème siècle, ont contribué à la formation d’un monde slave de tradition Byzantine s’étendant des Balkans à la Volga. La conversion de Vladimir cent ans plus tard, vers 989, marque la naissance d’une Église Russe qui va occuper une place essentielle dans la vie politique, économique et sociale de la Kiévie.
On date symboliquement la rupture entre les églises de Rome et de Byzance des anathèmes réciproques de 1054 lancés par Léon IX et Michel Cérulaire. La discorde en réalité couvait depuis longtemps entre un orient et un occident issus l'un de la civilisation grecque l'autre de la civilisation latine, relevant chacun de souverainetés parfois opposées. Nous donnons aujourd'hui le nom d'orthodoxes aux églises byzantines qui ont choisi de s'affranchir du lien de Rome, et nous appelons catholiques les églises restées en communion avec Rome.
Dès 1596, lors du synode de Brest-Litovsk (aujourd'hui en Biélorussie) les chrétiens de tradition orthodoxe, obtiennent leur ralliement au Vatican sans rien changer à leur liturgie ni à leurs traditions. On désigne ces chrétiens sous le nom d'Uniates.
Les Uniates, persécutés sous Staline, résistèrent clandestinement à la répression, célébrant leur culte au fond des forêts. Ce n'est qu'avec la perestroïka et l'indépendance de l'Ukraine, en 1991 que cette « Église de la forêt » - comme l'ont surnommée les uniates eux-mêmes - sortit de l'ombre.
J'arrive dans cette ville alors qu'elle célèbre le vingtième anniversaire de l'indépendance de l'Ukraine. Une multitude de personnes ont revêtus un vêtement blanc avec des broderies rouges. Le plus bel exemple en étant la petite fille que j'ai photographiée.
Les villes Ukrainiennes avec leur lacis de rues sont très différentes des villes russes qui récentes ont de larges avenues et un dessin géométrique. En cela les villes ukrainiennes sont plus proches des villes européennes.
14 septembre 1990. Lviv se libérait en descendant de son piédestal son dernier maître, pour redonner sa place presque au même endroit à un autre maître, celui de l'esprit et de l'indépendance incarnés par un héros de l'histoire de l'Ukraine, Taras Chevtchenko.
Né serf, émancipé en 1838, il étudie à l’académie des beaux-arts de St-Petersburg. Grand poète de la langue ukrainienne, il développe une active propagande en faveur de l’abolition du servage, de l’égalité sociale et de la prise de conscience nationale qui lui valent dix ans de déportation en asie centrale. Devenu le symbole de l’Ukraine, les anniversaires de sa mort et de sa naissance donnent lieu à des manifestations où se joignent intellectuels et paysans.
Ivan Franko, symbole de la culture nationale de langue ukrainienne.
Ivan Fedorov (plus tard changé en Fedorovych) († 14 décembre 1583 ), était l’un des pères de l'impression ukrainienne russe. Il a créé une presse à Ostrih, où, en 1581, il a édité la bible dite d'Ostrih.
Il fut également le fabricant principal du canon et l'inventeur d'un mortier multibarrillet.
Petro MOHYLA (1596-1647) Théologien et prélat réformateur. Issu d’un lignage princier de Moldavie .
Archimandrite au monastère des Grottes de Kiev et, dès 1633, métropolite de Kiev. Fondateur de l’Académie, il cherche à décentraliser l’Eglise, restaure les propriétés ecclésiastiques qui furent saisies par les Polonais
En s’efforçant de faire coexister les cultures byzantine et latine, il introduit le courant occidentaliste dans la culture ukrainienne.
Opéra Ivan Franko occupe la place centrale de l'avenue Svoboda (de la liberté). Sur le fond du ciel se dessinent nettement les sculptures ailées de personnages allégoriques élevées sur le fronton: « La Gloire à la Musique » et de chaque côté « Le Génie de la Tragédie »
Je m'apprête à quitter ce qui reste de « La grande Russie » mais déjà flotte un parfum d'Europe
Le nombre important d'églises dans cette ville (d'ailleurs exceptionnellement conservés) a une double signification . D'une part il s'agissait pour chaque église d'affirmer son existence et sa puissance à travers la magnificence de ses ornements. Mais plus politiquement elles permettaient au nationalisme d'exister et à l'idée d'indépendance de résister.
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